Parcours santé et découverte pour les enfants de pédopsychiatrie

Pédiatre à la clinique toulousaine André Chaurand – l’unité d’hospitalisation qui dessert les trois secteurs de pédopsychiatrie de Haute-Garonne –, Emmanuelle Mimoun et ses collègues ont imaginé un Parcours santé d’activité physique (AP) et de découverte  sensorielle pour améliorer le bien-être des enfants hospitalisés. Ce Parcours se compose d’agrès installés dans le parc de l’hôpital et d’un ensemble de bacs de plantes aromatiques et florales  entretenu par les enfants et l’équipe de l’association des jardins partagés de l’hôpital.
 
Dans cette vidéo, Emmanuelle présente son projet qui bénéficie à la quarantaine d'enfants de 3 à 12 ans accueillis chaque année pour des soins intensifs à la clinique toulousaine André Chaurand : 
 


Outre les bienfaits de l’AP en population générale, le Parcours leur offre des bénéfices additionnels : meilleure conscience du schéma corporel, repérage spatio-temporel, ajustement relationnel – grâce aux contacts avec les autres patients sur le Parcours. Mais aussi des bénéfices d’ordre psychique, comme l’amélioration des capacités cognitives ou la réduction de l’anxiété et de la dépression. Ce Parcours bénéficiera également à la future unité qui, d’ici 2023, permettra de rassembler le suivi des adolescents aujourd’hui reçus sur quatre sites différents de l’hôpital.

Entretien avec Emmanuelle MIMOUN

La pédiatre Emmanuelle Mimoun a reçu le Prix de Pédiatrie Sociale 2020 pour le projet "Parcours santé et découverte pour les enfants de pédopsychiatrie". Pédiatre à la clinique André Chaurand, à Toulouse, qui dessert les trois secteurs de pédopsychiatrie de Haute-Garonne, Emmanuelle Mimoun a conçu un parcours d’activité physique (AP) et de découverte sensorielle au sein de l’hôpital pour améliorer le bien-être physique et psychique des enfants hospitalisés. La réalisation de ce projet implique également 13 autres professionnels.
 

D’où est venue l’idée d’un Parcours physique et sensoriel ? Des précédents vous ont-ils inspirée ?

L’OMS et la Haute Autorité de Santé en France mettent depuis longtemps l’accent sur les bienfaits d’une activité physique régulière pour tout un chacun. Le Plan Régional de Santé Occitanie 2022 insiste de son côté sur la nécessité d’un accès aux soins et aux diverses installations de santé pour les populations les plus précaires et en situation de handicap.

Nous sommes partis pour notre part d’une réflexion de longue date menée au CLAN (Comité de Liaison Alimentation Nutrition) de l’hôpital Marchant sur la nécessité de combattre la sédentarité qui sévit particulièrement chez nos patients en psychiatrie du fait de leurs pathologies, des comorbidités associées, mais aussi de leurs traitements (hospitalisation, médicaments…), causant des effets néfastes sur la santé à long terme. Nous avons par ailleurs interrogé les patients des divers pavillons (méthode des "focus groups" ou groupes de discussion) pour recueillir leur avis sur les aménagements souhaitables du parc de l’hôpital, qui est vaste et verdoyant.

Les enfants ont été particulièrement imaginatifs lors de cette phase, prenant appui sur les activités que les soignants leur proposaient déjà à l’hôpital, et proposant des installations et animations attrayantes pour eux. L’idée du parcours sportif est également venue de la démarche que la ville de Toulouse développe dans ses coulées vertes et ses parcs, avec l’installation d’agrès en accès libre qui rencontrent un grand succès.

Enfin, nous avons la chance de bénéficier de jardins partagés au sein de l’hôpital. Les enfants hospitalisés apprécient déjà beaucoup les pique-niques organisés par l’équipe de soin, et bénéficient d’activités régulières de découverte des fruits et légumes. Nous avons imaginé qu’ils puissent y cultiver leurs propres essences pour les ouvrir à la découverte du goût et aux bienfaits physiques et psychiques des réalisations potagères individuelles.
 

En quoi la création de ce Parcours peut-elle aider les enfants hospitalisés à la clinique, durant l’hospitalisation et après ?

Les psychomotriciennes nous ont aidés à réfléchir sur des installations qui pourraient développer tous les aspects que nous travaillons au quotidien dans le soin des enfants en hospitalisation, notamment l’estime de soi, le travail de groupe et l’ajustement relationnel, la coordination et l’équilibre, la planification ou le repérage spatio-temporel. En effet, les pathologies traitées à la clinique André Chaurand – l’aile pédopsychiatrique de l’hôpital Marchant – comprennent des troubles autistiques, des troubles envahissants du développement, des troubles de l’attachement, et beaucoup de ces enfants présentent des troubles neuro-développementaux associés pour lesquels le soin psychomoteur est primordial.

Ces enfants doivent en parallèle travailler sur leur insertion dans les apprentissages et dans les compétences sociales, sur lesquels ils sont en grande difficulté (c’est souvent une des raisons pour lesquelles ils ont besoin d’une hospitalisation temps plein plutôt que d’un soin ambulatoire plus léger).

Enfin, les bénéfices de l’activité physique sur le plan psychique (amélioration des capacités cognitives, réduction de l’anxiété et de la dépression) se poursuivront après l’hospitalisation grâce aux compétences données aux enfants dans les activités motrices, sensorielles et sociales, qu’ils pourront reproduire en autonomie à l’extérieur.
Nos installations doivent donc leur servir à travailler et développer sur place toutes les compétences dont ils se serviront en sortie de prise en charge pour rejoindre des soins plus légers et une insertion familiale, sociale et scolaire plus aisée.

 

En escomptez-vous également des retombées pour l’équipe soignante ?

Les adultes accompagnent les enfants à tout instant dans leur montée en compétence. Ils pourront également bénéficier des installations du parc de l’hôpital à titre personnel en-dehors de leurs horaires de travail, pour se détendre et pour retrouver un équilibre physique et psychique personnel.
 

Une extension du dispositif à d’autres services de pédopsychiatrie vous semble-t-elle envisageable ?

Un tel concept existe déjà, décliné à différents niveaux, dans beaucoup d’unités de pédopsychiatrie. En revanche, c’est l’étude des bienfaits de ce type précis d’installations et de leur utilisation théorisée par l’équipe que nous souhaitons mettre en valeur et diffuser à travers publications et communications. Nous espérons ainsi ouvrir la voie à d’autres unités, afin de généraliser la prise en compte des apports de l’activité physique dans tous les champs décrits plus haut.