Impact du peau à peau sur la mise en place des premiers échanges mère-bébé et sur ses effets à moyen terme

"Impact du peau à peau sur la mise en place des premiers échanges mère-bébé et sur ses effets à moyen terme" : tel est le sujet de thèse de la lauréate de la Bourse de Recherche de la Fondation Mustela en 2014, Aude Buil. Alors doctorante à la faculté Paris-5 Descartes, Aude Buil est psychomotricienne. Son projet de recherche est né des difficultés relationnelles ou des styles interactionnels particuliers entre mères et nouveau-nés prématurés qu’elle a observés, alors qu’elle exerçait en service de médecine néonatale et en centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP). Objectif : améliorer l’accompagnement en amont, dès l’hospitalisation néonatale.

De fait, ce sujet était de plus en plus présent, puisque en 2010, la prévalence de la prématurité en France atteignait 7,4 % des naissances, toutes prématurités confondues. Aussi la pratique de séance de peau à peau est-elle depuis lors couramment utilisée dans les services de médecine néonatale, dont les recherches mettent en évidence les nombreux bienfaits. Mais, telle que pratiquée en France, elle présente trois inconvénients : interactions visuelles limitées, nécessité pour la mère de maintenir la posture de l’enfant et posture pathogène du nouveau-né sur sa mère. En effet, l’installation privilégiée est de type "vertical" : le bébé est installé sur le ventre, entre les deux seins de sa mère, elle-même assise dans un fauteuil. Le simple choix d’une position semi-verticale, semi-allongée, en diagonale sur la poitrine de la mère, limiterait ces inconvénients. Le recours à une écharpe de portage extensible, nouée en bandoulière sur l’épaule, libérerait la mère du souci de bien tenir son enfant. Enfin, la position du nouveau-né pourrait être adaptée pour éviter le phénomène de "grenouille écrasée" connue pour son impact négatif sur le développement musculaire et orthopédique du bébé.

Au service de médecine néonatale du Centre hospitalier Sud francilien, Aude Buil avait déjà réalisé en 2013 une étude observationnelle sur ces deux postures : la verticale, majoritaire en France, et la position alternative dite de la "flexion diagonale soutenue" (FDS). Résultat : la FDS est "une technique innovante, non coûteuse et facile à utiliser dans la pratique quotidienne de tous les professionnels de santé impliqués en médecine néonatale". S’appuyant sur cette expérience pilote, la jeune chercheuse a alors étendu son étude aux conséquences des modalités du peau à peau en médecine néonatale. Elle a ainsi contribué à "améliorer l’action thérapeutique de ce soin entre la mère et le nouveau-né prématuré lors de l’hospitalisation et jusqu’aux trois mois de l’enfant, au bénéfice des interactions précoces, du bien-être de la mère et naturellement, du développement du prématuré lui-même.

Entretien avec Aude BUIL

Mon projet de recherche est né des observations des difficultés relationnelles entre mères et nouveau-nés prématurés en service de médecine néonatale et en centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP). Il vise à améliorer l’accompagnement de la prématurité en amont, dès l’hospitalisation néonatale – une situation de plus en plus courante, puisque la prévalence de la prématurité atteint 7,4 % des naissances en France.
 

Du peau à peau vertical…

Avec la prématurité, les séances de « peau à peau » deviennent une pratique courante. Aussi appelée « soins kangourou », l’installation privilégiée est « verticale » : le bébé est installé sur le ventre, entre les deux seins de sa mère, elle-même assise dans un fauteuil. Elle présente trois inconvénients : interactions visuelles limitées, nécessité pour la mère de maintenir la posture de l’enfant et posture du nouveau-né sur sa mère, non optimum, au niveau psychomoteur.
 

... à la flexion diagonale soutenue

Au service de médecine néonatale du Centre hospitalier Sud francilien, j’ai effectué en 2013 une étude observationnelle sur cette position majoritaire et l’ai comparée à une position alternative, que j’ai créée et baptisée "flexion diagonale soutenue" (FDS). Le bébé se trouve en position semi-verticale, semi-allongée, sur la poitrine de sa mère, ce qui facilite les interactions visuelles. Le recours à une écharpe de portage extensible, nouée en bandoulière sur l’épaule, libère la mère du souci de bien tenir son enfant. Enfin, la position du nouveau-né est adaptée pour éviter le phénomène de "grenouille écrasée". J’ai ainsi pu constater que la FDS est une technique innovante, non coûteuse et facile à mettre en œuvre au quotidien.
 

À moyen terme

M’appuyant sur cette étude pilote, je souhaite, dans le cadre de ma thèse, élargir mon étude aux conséquences à moyen terme du recours à la FDS en médecine néonatale, c’est-à-dire jusqu’aux trois mois de l’enfant. Pour cela, je conduis une étude multicentrique dans deux hôpitaux situés en France et en Suisse, dans un premier temps. Enfin, un volet de ma thèse portera sur les représentations psychosociales du peau à peau chez les soignants et les parents.