Expérience anticipée du handicap dans le diagnostic prénatal

Docteur en médecine spécialisée en gynécologie obstétrique, Véronique Mirlesse exerçait en 2009 à la maternité Centre hospitalier Bichat/Claude Bernard et à l’hôpital universitaire de Genève, en Suisse. Sa thèse de Santé publique, option économie et sciences sociales, a été réalisée sous la direction d’Isabelle Ville, sociologue spécialisée dans le handicap au CERMES et étudiait l’anticipation de l’expérience du handicap dans le cadre du diagnostic prénatal. Quels sont les acteurs de cette anticipation, comment sont-ils organisés et comment interagissent-ils avec le couple des parents ? Pour mieux répondre à ces questions, Véronique Mirlesse – qui maîtrisait parfaitement le portugais – a procédé à une enquête qualitative comparative entre la France et le Brésil, deux pays dans lesquels le diagnostic prénatal est vécu de manière très différente (l’IVG est, toujours à l'heure actuelle, interdite dans ce second pays, sauf en cas de viol ou de menace pour la vie de la future mère).

Entretien avec Véronique MIRLESSE

Médecin Obstétricienne, spécialiste d’échographie et de médecine fœtale, j’ai longtemps travaillé à l’Institut de Puériculture dans une petite unité de diagnostic anténatal et de prise en charge de grossesses à haut risque fœtal en grande proximité avec les pédiatres réanimateurs, les pédopsychiatres et des unités de développement de l’enfant de type Centres d'action médico-sociale précoce (Camsp). Durant cette période, j’ai publié des articles en médecine fœtale et diagnostic prénatal. J’ai également coordonné l’ouvrage Interruption de grossesse pour pathologie fœtale (Flammarion, Médecine Science, 2001) qui a reçu le prix de la revue Prescrire. J’ai participé à de nombreux autres ouvrages et enseignements en restant toujours attentive au vécu des femmes et des équipes soignantes, notamment lors des accouchements traumatiques, dans les contextes de séparation néonatale, ou encore lors de l’accompagnement des grossesses chez les femmes aveugles.
 

Brésil et France face au handicap

Dans le cadre de ma thèse, je me demande comment se construit, durant la grossesse, l’idée que l’enfant à naître puisse être porteur d’un handicap. A partir du suivi des grossesses dans deux pays aussi différents que la France et le Brésil (l’IVG est interdite dans ce second pays, sauf en cas de viol ou de menace pour la vie de la future mère), notre objectif est d’étudier comment interagissent les sciences, les techniques, les règles sociales, le discours tenu par les professionnels et les juges, en interaction avec les familles.
 
En collaboration avec le laboratoire du Cermes (Centre de recherche médecine, sciences, santé et société, CNRS-INSERM) et sous la direction d’Isabelle Ville, en France, et de Suely Deslandes, à la Fiocruz, au Brésil, cette étude repose sur une analyse qualitative comparative des consultations prénatales.