Amélioration du vécu des femmes et de leurs partenaires en période péri- et post-natale

Sage-femme au CHU Estaing de Clermont-Ferrand, Manon Grampayre consacre sa thèse à « l’amélioration du vécu des femmes et de leurs partenaires en période péri- et post-natale », réalisée à l’université Clermont-Auvergne.

Un projet né du constat que si chez la mère, les troubles mentaux périnataux sont de mieux en mieux connus, il n’en est pas de même pour son partenaire. Le futur père occupe pourtant, depuis des années, une place croissante dans le vécu de la grossesse, le travail et l’accouchement, et il est lui aussi susceptible de souffrir de stress, anxiété, dépression, voire syndrome de stress post-traumatique. Or il n’existe pas d’outil validé en français pour diagnostiquer les troubles mentaux paternels.

L’objectif principal de Manon Grampayre est donc d’adapter dans notre langue l’auto-questionnaire «Perinatal Assessment of Paternal Affectivity» (PAPA) mis au point par une équipe italienne, afin de tester son utilité et sa pertinence. Cet outil pourra ainsi être utilisé dans le contexte français pour évaluer l’état psychologique du père en période pré- et postnatale.

Entretien avec Manon GRAMPAYRE

Sage-femme au CHU Estaing de Clermont-Ferrand, Manon Grampayre consacre sa thèse à « l’amélioration du vécu des femmes et de leurs partenaires en période péri- et postnatale » à l’université Clermont-Auvergne. Un projet de recherche né du constat que si chez la mère, les troubles mentaux périnataux sont de mieux en mieux connus, il n’en est pas de même pour son partenaire, faute notamment d’outil validé en français pour les diagnostiquer. L’objectif principal de la recherche est donc d’adapter et valider en français l’auto-questionnaire “Perinatal Assessment of Paternal Affectivity” (PAPA) mis au point par une équipe italienne. 
 

Pourquoi, à votre avis, n’existe-t-il pas d’outil pour mesurer la santé mentale du père et futur père en France ? 

Historiquement, la littérature s’est concentrée sur la santé mentale périnatale des mères et en France, si l’on dispose d’outils de dépistages validés, leur utilisation reste encore limitée et les filières de soins adaptées ne commencent que doucement à émerger. Pour l’instant, dans notre pays, on utilise seulement, pour les pères, un questionnaire sur le vécu de l’accouchement et un autre sur le trouble de stress post-traumatique lié à l’accouchement. Mais la société évolue depuis quelques décennies pour accorder une place croissante aux pères. 
Au sein de notre service, nos recherches ont porté à plusieurs reprises sur le vécu des femmes ; parallèlement, une unité de soins psychiques en périnatalité a été créée. Il était logique de vouloir ensuite prendre en compte leurs partenaires. 


Quel usage est-il fait aujourd’hui du questionnaire PAPA en Italie, et quel pourrait-il être en France ?

La validation du questionnaire PAPA est assez récente en Italie : il date de 2022. Son utilisation vise à dépister les pères à risque afin de procéder à des évaluations approfondies et d’offrir un soutien adéquat. Ses auteurs aspiraient aussi à ce que le questionnaire permette une meilleure implication paternelle dans les services de santé de la petite enfance.
En France, l’adaptation transculturelle et la validation du PAPA permettraient de disposer d’un outil simple, facile à utiliser en pratique courante, afin de dépister d’éventuels signes ou symptômes de détresse psychopathologique paternelle en période pré- et postnatale. Améliorer le dépistage et la prise en charge des troubles psychologiques périnatals s’inscrit d’ailleurs dans la politique publique française des «1000 premiers jours» de 2020.


Comment évaluez-vous sa pertinence ?

Pour que la mesure subjective obtenue par le questionnaire PAPA soit reconnue comme valide ou fiable, le questionnaire doit répondre à un ensemble de propriétés psychométriques, telles que la validité et la reproductibilité. Le but est d’évaluer à quel point les réponses obtenues représentent correctement le concept à mesurer : ici, plusieurs dimensions de la santé mentale du père (anxiété, dépression, stress etc.). C’est primordial pour l’interprétation adéquate des résultats et leur application clinique. 


Concrètement, comment allez-vous procéder ?

En prénatal, nous allons recruter les futurs pères lors des consultations, échographies ou cours de préparation à la naissance et à la parentalité au sein du CHU ou auprès de libéraux. En postnatal, nous allons inclure des pères lors du séjour à la maternité, puis le questionnaire leur sera envoyé à huit semaines du postpartum.


L’objectif secondaire de votre thèse est de dresser un bilan de la santé mentale des pères en péri- et postnatal. Quelles sont vos hypothèses à ce sujet ? 

Au-delà de la diversité d’échelles et de méthodes d’évaluation, la littérature retrouve jusqu’à 10% de dépression paternelle ainsi que de fréquents troubles anxieux : 4 à 16% en prénatal et 2 à 18% en postnatal. Notre hypothèse est que repérer les vulnérabilités de chaque parent permettrait de réduire les conséquences familiales, sociales et professionnelles négatives. Ce dépistage pourrait également améliorer la qualité du lien parents-enfant, indispensable à son bon développement.